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Manchester City-Real Madrid: le héros Lunin, le raté de Bernardo Silva... récit d'une séance de tirs au but mémorable

Le Real Madrid a éliminé Manchester City en quarts de finale de Ligue des champions, avec une victoire aux tirs au but au match retour. Une séance qui avait mal commencé pour les Madrilènes.

Il est 23h35. Daniele Orsato porte le sifflet à sa bouche. Il siffle la fin de la prolongation du match entre Manchester City et le Real Madrid, comptant pour les quarts de finale retour de Ligue des champions. Le score est de 1-1. La fatigue se fait ressentir sur le terrain depuis un moment pour bon nombre de joueurs, mais il va pourtant falloir se ressourcer physiquement et mentalement en quelques minutes pour disputer la séance de tirs au but.

Andriy Lunin, qui a essuyé 11 tirs cadrés, sort rapidement du terrain. Carlo Ancelotti s'adresse à lui succintement avant de le laisser rejoindre le banc de touche. Le gardien ukrainien y retrouve son préparateur Luis Llopis et sa doublure Kepa Arrizabalaga, dont l'arrivée l'été dernier le vouait à être privé de temps de jeu.

"Tous les joueurs voulaient tirer"

Pendant ce temps, Ederson marche tranquillement pour rejoindre ses coéquipiers sur le bord de la pelouse. Pep Guardiola s'adresse à son groupe, comme toujours avec passion et longueur. La scène dure environ deux minutes. Du côté du Real Madrid, Carlo Ancelotti sort brièvement de sa posture de père serein pour motiver ses troupes. Un discours très motivateur d'une dizaine de secondes seulement. Suffisant pour galvaniser les troupes, au regard des réactions.

Les joueurs du Real se placent presque tous sur la ligne médiane, quand leurs adversaires sont encore en conciliabule. "Tous les joueurs voulaient tirer", confiera Lucas Vazquez. Vient finalement le moment du toss. Kyle Walker le remporte. Après prise de renseignement vers le banc, il décide de faire tirer Manchester City en premier. C'est une bonne chose: les statistiques sont favorables aux équipes qui débutent le spectacle.

23h40, la séance de tirs au but démarre avec Julian Alvarez. L'élan est court et désaxé, le pied droit est ouvert pour le tir. Contrepied, c'est au fond des filets. Le vétéran Luka Modric est le premier Madrilène à se présenter. Il tire croisé du pied droit. Un choix classique pour assurer. Ederson s'interpose. C'est le premier moment fort de la séance: Manchester City prend l'avantage, 1-0.

Le moment de flottement avant le choix osé de Bernardo Silva

De rage, Luka Modric tape dans le ballon qui revenait vers lui et l'envoie en tribune. Derrière, Bernardo Silva se présente. Lui et l'arbitre sont interloqués: il n'y a pas de ballon. En effet, il est entre les mains des supporters mancuniens. Le ballon est rendu, mais le milieu offensif portugais a dû attendre une bonne vingtaine de secondes. Une éternité dans un tel moment de tension. "Cela a pu le déconcentrer", estime l'ancien défenseur Joleon Lescott, consultant pour TNT Sports.

Les spécialistes rappellent souvent qu'un tir en plein milieu est une option intéressante. Une question de psychologie, en fait: un gardien mené et qui vient d'encaisser peut avoir envie de plonger pour tenter de se refaire et ne pas avoir l'impression de subir le cours des événements. Une étude relayée par The Guardian montrait que les gardiens ne restaient qu'environ 6% du temps au milieu. Mais le tireur doit lui aussi lutter contre la peur du ridicule. Bernardo Silva a-t-il pensé à tout cela? Sa tentative du pied gauche part plein axe. Sauf qu'Andriy Lunin ne bouge pas d'un poil et capte le cuir. Jude Bellingham, le tireur suivant, a donc une opportunité à saisir. Sa frappe du pied droit, à peine croisée, est risquée. Mais Ederson va sur sa gauche. Le Real revient à égalité.

"Nous l'avons préparé avec l'entraîneur des gardiens et il y avait trois joueurs avec lesquels nous avions des doutes sur le fait de rester au milieu ou non, a raconté Andriy Lunin à Marca. Nous en avons choisi de le faire sur un seul parce qu'il y a cinq tirs et on ne peut pas rester au milieu de chacun des tirs".

Bernardo Silva avant de taper un tir au but contre le Real Madrid, à Manchester le 17 avril 2024
Bernardo Silva avant de taper un tir au but contre le Real Madrid, à Manchester le 17 avril 2024 © RMC SPORT

Rüdiger, celui qui avait "le plus de confiance"

Au tour de Mateo Kovacic. Son tir, du pied droit, est croisé et au sol. Andriy Lunin plonge du bon côté, celui que, quelques secondes auparavant, avait annoncé Antonio Rüdiger d'un geste de la main. C'est encore arrêté, avec un brin de réussite. Lucas Vazquez se présente pour renverser la situation: il tente lui aussi le choix facile, en tirant croisé du pied droit. Pourtant, Ederson part encore de l'autre côté. Le Real Madrid passe devant pour la première fois.

S'en suivent deux tentatives réussies avec un tir ouvert, du gauche pour Phil Foden, du droit pour Nacho. Les deux gardiens sont pris à contrepied. Surprise du chef: Ederson prend ses responsabilités. S'il rate, c'est terminé pour Manchester City. Du pied gauche, le portier brésilien tape fort à gauche. Son homologue anticipe bien, mais c'est suffisamment puissant et bien placé.

Balle de match pour Antonio Rüdiger. Pourquoi lui, alors que les stars offensives sont habituellement appelées au rendez-vous pour les moments décisifs? "C'est un joueur qui a des couilles, admettra très honnêtement Davide Ancelotti, adjoint et fils de l'entraîneur italien. J'ai écrit les cinq lanceurs, j'ai consulté Carlo, j'ai aussi eu l'aide de Kepa et des joueurs, et le tout a été un peu modifié".

L'élan de l'Allemand est court et très axial. Dans ces conditions, difficile d'imaginer un défenseur central de son genre ouvrir son pied droit pour risquer un tir à droite. Antonio Rüdiger s'élance et choisit l'option croisée. "C'est le seul qui avait autant de confiance", dira Toni Kroos à Marca. Ederson plonge bien. Mais c'est trop puissant. Et trop bien placé: le ballon franchit la ligne avec l'aide du poteau. 3-4, c'est fini. 23h47, le Real Madrid élimine Manchester City, tenant du titre, de la Ligue des champions aux portes du dernier carré.

JA