jeux olympiqueL’escalade va-t-elle voler la vedette lors des JO de Paris 2024 ?

JO de Paris 2024 : L’escalade va-t-elle voler la vedette aux autres disciplines cet été ?

jeux olympiqueDes possibles champions français, une épreuve esthétique et spectaculaire, un sport qui perce partout dans le monde... Oubliez la Seine ou la Tour Eiffel, la vraie star de Paris cet été aux Jeux Olympiques, c'est l'escalade
L'escalade coche toutes les cases pour faire un carton aux JO...à condition de passer à la télé.
L'escalade coche toutes les cases pour faire un carton aux JO...à condition de passer à la télé.  - Damien Largeron / Damien Largeron
Jean-Loup Delmas

Jean-Loup Delmas

L'essentiel

  • Trois ans après Tokyo, l'escalade fait son retour aux Jeux Olympiques de Paris cet été.
  • En 2021, l'épreuve, qui faisait sa première apparition aux Jeux, avait été la plus « googlé » des Jeux nippons.
  • Le sport, dont la pratique explose partout dans le monde et ne France, a tout pour encore plus briller cet été, et même devenir l'épreuve reine un peu surprise de ces JO.

La star de ces Jeux Olympiques 2024 ne sera pas le nageur Léon Marchand, pas plus que le sprinteur américain Noah Lyles, ni même la judokate Clarisse Agbegnenou à la conquête de toujours plus d’or. Cet été à Paris, les spectateurs du monde entier n’auront d’yeux que pour l’escalade. Le postulat peut sembler un poil audacieux, il n’empêche, la triple épreuve possède une belle tête de « show stealer ». L’évenement qu’on attendait pas aussi fort et qui vole la vedette à tout le monde.

Richard Wawrzyniak, ancien journaliste sportif et auteur de Histoire(s) des Jeux olympiques (2021, Maureuil Editions), s’y connaît plutôt en matière de JO, et son flair est formel. « L’escalade a clairement de l’avenir aux Jeux olympiques, tant elle coche toutes les cases. » Comprendre être à la fois « spectaculaire, rapide, esthétique, que même les néophytes peuvent suivre et comprendre les enjeux, des corps en mouvement » et, dans le cadre de l’épreuve de vitesse, « un duel visible : les concurrents s’affrontent en même temps et on peut voir en temps réel qui est le vainqueur. » Des caractéristiques communes avec les épreuves reines de l’athlétisme ou de la natation.

« Il y a forcément une épreuve que tu vas aimer »

Preuve de sa JO-compatibilité, l’épreuve fut la plus « googlée » pendant Tokyo 2020, où elle faisait sa première apparition olympique. Bonus supplémentaire trois ans plus tard, la France s’avance avec de vraies chances de médailles sur son sol. Guillaume Vallet, professeur d’économie du sport, le reconnaît : rien de tel qu’une victoire locale pour ancrer un sport dans la légende des Jeux. Même analyse pour Richard Wawrzyniak : « Le judo, très populaire et indissociable des Jeux désormais, ne fait son apparition qu’à Tokyo 1964 », où le Japon prendra trois titres sur quatre, « une bonne manière de solidifier l’épreuve. »

Justement, place à une potentielle future médaille cet été. Oriane Bertone, championne de France et vice-championne du monde de bloc à 20 ans, qui défend son bout de gras : « Esthétiquement, c’est un sport très beau, très plaisant à regarder. Très varié également. Il y a trois types d’épreuves – le bloc, la vitesse et la difficulté, avec huit grimpeurs par discipline. Il y a forcément une épreuve que tu vas aimer, et un athlète à qui t’identifier. »

Un succès indépendamment des Jeux

Guillaume Vallet tempère un peu l’effervescence générale : « Des hypes à court terme au JO, on en a vu, comme le bobsleigh, iconique en 1998 et qui a perdu de son intérêt depuis. » Une fois au sommet, le grimpeur saura-t-il y rester ?

Oriane Bertone, championne de France
Oriane Bertone, championne de France - Bernardo Gimenez/Black Diamond

Oriane Bertone veut y croire. Car même quand on a le potentiel de décrocher l’or, on le sait, il n’y a pas que les Jeux dans la vie : « Je vois bien qu’il y a une hausse de popularité de ce sport, même avant Paris 2024. Dans les salles d’escalade, on me reconnaît de plus en en plus, on me demande des photos, les sponsors se font plus présents… » C’est peut-être ça, qui assure le statut de « show stealer » à l’escalade cet été. Le sport est déjà en plein boom, et le voilà qui trouve enfin un écrin à sa mesure.

« Pas d’effet » après Tokyo dans les salles d’escalade

« Les Jeux peuvent ouvrir certaines portes, mais c’est une fois tous les 4 ans. Ce qui garantit le succès à long terme de l’escalade, c’est que c’est un sport convivial et bon esprit, poursuit la jeune championne. Tu fais une séance avec tes potes, tu t’amuses, tu vas boire une bière après. Même moi dans le haut niveau, j’y trouve du fun et un côté ludique. Ce n’est pas de la natation. »

Maria Fuentes, directrice de la communication d’Arkose, ne croit pas non plus en « un effet JO ». En 2021, il n’y en a pas eu après Tokyo, certes dans un contexte très particulier de Covid-19. En 2024, « on ne s’attend pas à un raz-de-marée après Paris », mais on compte sur une croissance naturelle. Au premier semestre de l’année, comptez 26 % de nouveaux inscrits par rapport à 2023, + 18 % de passage et + 14 % de chiffre d’affaires. « Ce qui marche principalement, ce n’est pas les compétitions sportives d’élite, mais le simple bouche à oreille. 70 % des nouveaux entrants viennent de là. »

Trop d’esthétisation ba?

Un boom de pratiquant qui invite néanmoins Richard Wawrzyniak à cocher une nouvelle case dans la to-do-list-pour-briller-cet-été : « C’est l’une de ses grosses forces pour s’imposer aux Jeux : un sport d’urbain et moderne », vante-t-il. Le basket 3x3, qui a également débuté à Tokyo, est un autre bon exemple à ses yeux.

Succès garanti en août ? Méfiance. Maria Fuentes rappelle : « Ca va dépendre aussi de la place que les chaînes de télévision lui accorderont, de la qualité de la retransmission, des commentaires… Ces derniers avaient notamment été critiqués à Tokyo 2020 ».

Et tant qu’on est à chipoter : cette chronique d’une hype annoncée à venir et l’olympisation de ce sport ne sont pas toujours vus d’un bon oeil dans le milieu. « Les épreuves sont suresthétisées pour que tout le monde puisse comprendre », ronchonne Lucas, grimpeur depuis quinze ans. Il craint par exemple une surreprésentation des jetés, un saut entre deux prises, tandis qu’il n’y aura quasiment pas d’arquée – sorte de prise ignoble à serrer avec seulement ses phalanges « car ça ne rend pas bien à la télé ou que le public n’en comprend pas la difficulté. Alors oui, ça va cartonner cet été, mais ce n’est pas de l’escalade. »

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